En pleine révolution de l’intelligence artificielle, une tendance marketing inquiétante émerge : la personnification des IA.
Sous des noms comme Claude, Devin ou « employé IA », ces outils sont vendus comme des collègues plutôt que comme des logiciels. Ce glissement sémantique n’est pas anodin. Il transforme la perception de l’IA, fausse les attentes et minimise ses effets sur le monde du travail.
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Derrière cette approche se cache une stratégie claire : rendre l’IA plus accessible et rassurante. En l’appelant « assistant », « collaborateur » ou en lui donnant un prénom humain, on réduit la distance entre la machine et l’utilisateur. On fait croire que ce n’est pas une menace, mais un partenaire.
Des startups comme Atlog parlent d’un « employé IA » capable de gérer 20 magasins. D’autres, comme Anthropic, misent sur Claude, une IA présentée comme chaleureuse et digne de confiance. Ce procédé rappelle certaines applications bancaires comme Dave ou Albert, qui masquent leur logique transactionnelle sous des noms humains. Mais cette stratégie cache une réalité bien plus brutale.
De la commodité à la déshumanisation
Derrière ce langage se dissimule un impact bien réel : la disparition progressive d’emplois. Dario Amodei, PDG d’Anthropic, estime que l’IA pourrait remplacer jusqu’à 50 % des postes de débutants dans les cinq prochaines années. Ce chiffre n’est pas anodin, surtout dans un contexte où le chômage tech est déjà élevé.
Présenter l’IA comme un « collègue » rend cette transition plus douce en apparence. Mais cela banalise aussi la perte d’emplois, en minimisant la rupture sociale. En désignant des outils comme des travailleurs, on brouille les lignes entre machine et humain, entre outil et remplaçant.
Revenir à un langage honnête
Les ordinateurs d’hier n’étaient pas des collègues, mais des outils. IBM n’a jamais présenté ses mainframes comme des collaborateurs numériques. Les PC étaient des postes de travail. Cette clarté permettait de comprendre leur rôle réel : accroître les capacités humaines, pas les effacer.
Aujourd’hui, nous devons retrouver cette sobriété. L’IA générative est puissante. Elle peut transformer notre façon de travailler, mais elle n’est ni une personne ni un partenaire. C’est un logiciel. Rien de plus.
Il est temps d’abandonner cette illusion du collègue IA. Ce sont des programmes, des algorithmes, pas des individus. L’avenir de l’IA passe par des outils qui soutiennent les humains, et non qui les remplacent. Arrêtons les fictions : ce que nous attendons de l’IA, c’est qu’elle nous aide à faire mieux, pas à disparaître.